Le vrai mystère de la couverture du "Lotus bleu"
La couverture dessinée par Hergé en 1936 pour Le Lotus bleu a fait couler beaucoup d’encre... À l’occasion de la Journée internationale de la langue chinoise ce 20 avril 2023, nous l’avons regardée de plus près.
Hergé imaginait qu’elle serait la couverture du cinquième album des Aventures de Tintin : Le Lotus bleu, où le reporter à la houppette démantèle un trafic d’opium international en Chine.
Son dessin, un carré de 35 cm par 35 cm à l’encre de Chine, aquarelle et gouache, entièrement en couleurs est d’une beauté renversante. On y voit Tintin et Milou qui se cachent dans un vase d’époque Ming, tandis qu’un dragon, chasseur de mauvais esprits, les protège. Les regards sont intenses et les couleurs figent le temps.

Le dessinateur n’est pas peu fier du résultat, d’autant que Le Lotus bleu, est un album spécial. Entre grande aventure, exotisme, écho de la politique internationale et hommage à la tradition graphique chinoise, Le Lotus bleu est un jalon essentiel dans l’œuvre d’Hergé et dans le parcours de Tintin. Après cet album, l’un comme l’autre ne regarderont plus jamais le monde comme avant… C’est aussi une véritable ode à l’amitié car il y fait apparaître Tchang, le seul personnage réel à être intégré aux aventures de son jeune héros - son ami, une rencontre qui le marqua à vie.
Mais les éditions Casterman (éditeur historique des Aventures de Tintin) refuseront le dessin jugé trop cher à la production. Hergé refera alors le travail, simplifié, au trait, à l’encre de Chine, avant de marquer ses indications de couleurs sur calque, ce qui donnera finalement la version que nous connaissons bien. La couverture prévue originalement se perdit…
Mais elle est aujourd’hui remise en lumière par le biais du projet Collection NFT Tintin.
Que cache la couverture du Lotus bleu ?
En la regardant de plus près, nous nous sommes demandé ce que signifiaient les cinq calligraphies (trois à l'encre de Chine et deux au crayon) sur cette couverture ?
Nous sommes partis en quête pour trouver leur signification et pour cela rien de tel que de solliciter TCHANG YIFEI, fille du grand ami d’Hergé.
TCHANG YIFEI rappelle avant tout qu’il s’agit d’un projet de couverture. Cette précision donne du sens à sa deuxième remarque : ces pictogrammes n’ont probablement aucun sens en tant que titre. D’ailleurs, ils n’ont pas de sens en tant que phrase, et certains ne sont même pas des mots chinois. Expliquons-nous…
Pour la fille du célèbre sculpteur, le but d’Hergé était probablement de donner une dimension exotique au dessin et montrer que l’histoire se passe en Chine. Littéralement donc cela ne veut rien dire car parmi les cinq dessins trois seulement existent et pourtant ils ne vont même pas ensemble…
le premier à l'encre de Chine : poisson. Notons un manque de trait puisque "poisson" en chinois s'écrit "魚". En effet, sur ce dessin il manque un trait sur la partie inférieure. Nous dirons donc que le poisson a la queue incomplète ;
le deuxième à l'encre de Chine n’existe pas en chinois ;
le troisième à l'encre de Chine : pointu ;
le premier au crayon n’existe pas en chinois ;
le deuxième au crayon : soldat.

TCHANG YIFEI avoue que son père lui avait dit à propos de cette couverture d’Hergé "Oh c’est un grand dessinateur, il dessine mais ne sait pas écrire en calligraphie".
Elle note aussi que c’est une langue de pictogrammes. Les pictogrammes sont des signes dessinés. Ils ont ceci de particulier qu'ils sont en relation étroite avec la réalité qu'ils représentent, à la différence des idéogrammes, qui renvoient eux aussi à une idée, mais sans que leur tracé ne cherche à représenter la réalité extralinguistique. Ainsi, TCHANG YIFEI par rapport à la couverture signale que le premier mot à l'encre de Chine, "poisson", est un pictogramme fort, on y voit la forme d'une tête, d'une queue, et même des écailles.
En chinois, il existe aussi des idéophonogrammes, où le choix de la composition est conditionné par la phonétique.
...La phonétique ? En voilà une bonne piste !
Si on reprend la couverture, à la lecture des idéogrammes de haut en bas en mandarin, le son de cette lecture pourrait être "Blue Lotus" (Long -tiew). Voilà qui ouvre le débat : peut-être qu’Hergé utilisait-il le son des mots plutôt que leur calligraphie. Mais cela reste à tout jamais un mystère...
Zoom sur le projet Collection NFT Tintin
Tintinimaginatio, en partenariat avec artèQ, lance les deux premiers NFT Tintin.
Deux NFT pour une seule œuvre :Le premier ("collectible"), le NFT Lotus bleu - une édition limitée à 1777 exemplaires en Ethereum.
Le second ("utilitaire"), le certificat NFT Lotus bleu qui est délivré à l'achat du tirage (impression "haute fidélité") édité en série limitée à 777 exemplaires.
Ces deux NFT feront bientôt partie d'une série intitulée "LES ŒUVRES MANQUANTES D'HERGÉ" dont le but est de réunir et de faire (re)découvrir des oeuvres absentes des collections du Musee Hergé. Et les opportunités qu'offrent aujourd'hui le web 3.0 vont permettre d'approfondir et de diffuser largement leur connaissance.
Plus d'information : digital.tintin.com
Deux NFT pour une seule œuvre :
Plus d'information : digital.tintin.com