Petites bêtes, grands effets
« Araignée du matin : chagrin ! » s’exclame Milou, dans Tintin au Congo, en voyant la bestiole filer sous son museau. Le ton est donné : dans l’univers d’Hergé, même les araignées savent se faire remarquer ! 
    
                                Et à l’approche d’Halloween, difficile de trouver meilleur sujet pour faire frissonner. 
    
            
                                Levons donc la toile… ou plutôt, le voile sur ces petites bêtes aux grandes pattes qui en disent long sur l’art d’Hergé et les peurs qu’il aimait subtilement provoquer.  
    
            
                                 
            Des débuts discrets
Première apparition officielle de la créature à huit pattes, dans Tintin au pays des Soviets. Ici, elle n’est pas directement représentée mais un indice trahit toute de même sa présence : deux de ses fameux pièges géométriques « habillent » la cabane en bois où Tintin et Milou trouvent refuge après leur déambulation dans la neige. 
    
            
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            Quelques cases plus loin, la pensionnaire des lieux se dévoile enfin. Encore faut-il avoir l’œil bien aiguisé, car la bestiole est suspendue dans le vide, depuis le col du fémur du squelette qui est logé dans l’horloge à 13 coups. Preuve, s’il en fallait, que « l’artiste » ne s’éloigne jamais de ses créations. 
    
            
                                 
            Un langage imagé
Point d’araignée dans Les Cigares du Pharaon alors que le jeune héros se trouve pourtant, un moment, dans un tombeau égyptien vieux de plusieurs millénaires. C’est donc dans Le Lotus bleu, qu’elle reparaît fièrement. Mais, cette fois-ci, de manière symbolique. 
    
            
                                Didi, l’un des personnages secondaires, a été atteint par une flèche enduite de suc de radjaïdjah qui provoque la folie. De fait, pour traduire visuellement son effet, Hergé dessine une araignée suspendue sur son fil, dans l’un de ses phylactères. 
    
            
                                Le message est clair mais prête évidemment à rire puisque le pauvre homme a littéralement – et visuellement parlant, aussi –… une araignée au plafond ! La trouvaille est savoureuse et illustre à merveille le goût d’Hergé pour les métaphores visuelles. 
    
            
                                 
            Petite mais costaude
Pas plus d’araignée dans le tombeau de Kih-Oskh que dans la jungle sud-américaine de L’Oreille Cassée. Il faut donc attendre L’Île Noire pour retrouver trace de l’individu. 
    
            
                                Sur les terres embrumées du château de Ben Moore, la petite bête reprend effectivement du service mais, cette fois-ci, pour rappeler qu’en matière de peur, ce sont rarement les plus imposantes qui effraient le plus. 
    
            
                                Il n’y a qu’à voir la réaction en chaîne dessinée par Hergé lors de la fameuse séquence du gorille. Ainsi, après avoir fait fuir Ranko dans un élan de courage et d’héroïsme, Milou – encore gonflé d’orgueil – détale à son tour, tétanisé par une araignée surgissant justement, à cet instant précis du récit. Une scène cocasse, digne de « l’arroseur arrosé », qui montre qu’un simple frisson suffit à remettre les plus forts à leur place. 
    
            
                                 
            Mutation fantastique
Après l'Écosse, direction Bruxelles et l’observatoire de L’Etoile mystérieuse pour suivre le fil de la tisseuse. Cette fois encore, elle choisit son moment avec un sens parfait du timing. La scène est d’ailleurs à « mourir de rire » (Milou dixit) puisqu’elle se glisse sur la lentille grossissante du télescope au moment où Tintin s’apprête à l’utiliser. De quoi provoquer chez ce dernier un sursaut bref et intense. 
    
            
                                 
            Mais la petite « grosse » bête n’a pas dit son dernier mot. Quelques planches avant la fin de l’album, elle refait surface, sur la météorite, après s’être échappée de la boîte de tartines du petit reporter. 
    
            
                                Le phénomène surnaturel du lieu faisant, elle grossit démesurément pour se transformer en une créature terrifiante. Heureusement, elle est bientôt neutralisée par une pomme – toute aussi géante. Ouf, il était moins une ! 
    
            
                                 
            Montée sur ressort
D’une frayeur à l’autre. Passons à présent du gigantisme à un ingénieux… mécanisme. Car dans L’Or Noir, l’émir Ben Kalish Ezab se fait surprendre par l’une des farces et attrapes dont seul son fils – le turbulent prince Abdallah – a le secret. 
    
            
                                Son rejeton est, en effet, un expert en la matière et sa dernière trouvaille n’est autre qu’une araignée en plastique, montée sur ressort et dissimulée dans une boîte d’allumettes – un petit chef-d’œuvre du genre, inspiré du principe du « diable en boîte » (ou Jack-in-The-Box) –, qui ne demande qu’à bondir. 
    
            
                                C’est chose faite lorsque l’émir ouvre l’étui en vue d’allumer son cigare. « Encore un tour de ce petit démon ! Je me demande comment il s’est procuré ceci » dit-il en contemplant, désemparé, l’objet du délit. Comme quoi, même en version factice, la bestiole fait encore et toujours son effet. 
    
            
                                 
            Danse avec une « star »
Après cet épisode comique, plus de nouvelle de la bête pendant les sept albums suivants. Vol 714 pour Sydney marque donc son grand retour et son ultime apparition dans la saga. Pour l’occasion, elle se retrouve face à un adversaire de taille qui n’est autre que… Rastapopoulos, l’ennemi juré numéro un de Tintin. Affublé d’un accoutrement de cowboy, ce dernier menace de l’écraser sous ses énormes bottes. 
    
            
                                Mais c’était sans compter sur l’agilité de l’animal, qui parvient à lui filer entre les pattes. S’ensuit alors une scène burlesque où le milliardaire se débat, s’énerve et se trouve ridiculisé par un adversaire minuscule, dans une gesticulation enlevée digne des mouvements énergiques et chaloupés des danses country. Yeehaw ! 
    
            
                                L’araignée finit donc son œuvre… dans l’œuvre, non pas par la peur, mais par un sympathique pas de danse doublé d’un joli pied de nez ! 
    
            
                                 
            Textes et images © Hergé / Tintinimaginatio - 2025
        
     
      
 
       
           
             
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